Est-il possible d’entrer dans un centre d’adoption sans être touchés ?
Croyez-nous, c’est non.
Pourtant, il a bien fallu aller trois fois à Los Chiquitines…
La première, c’était jeudi dernier, pour une rencontre « technique »; on n’a pas rencontré Johan, mais nous avons vu quelques enfants, au loin, qui jouaient dans la cour. Et plusieurs dizaines d’autres, en photos, sur tous les murs où se sont posés nos yeux.
La deuxième, c’était le lendemain, pour aller à la fois rencontrer Johan… et partir avec ! Cette fois, nous n’avons pas vu d’enfants dans la cour… mais les murs étaient toujours les mêmes…
Et il y a eu ce matin. Il était prévu qu’après le départ rapide de vendredi – c’est toujours ainsi avec les plus vieux : il faut couper le lien – nous allions revenir dans les jours suivants pour que Johan nous fasse visiter les lieux, qu’il partage une collation avec ses amis et qu’il dise Merci à tous ceux et celles qui ont pris soin de lui.
Johan étant Johan, nous lui avons demandé s’il voulait retourner à Los Chiquitines et, si oui, quand (Il aurait pu refuser, de peur qu’on soit tenté de le laisser là; des grands ont déjà ainsi réagi…) Mais il a dit Oui, et ça serait le jour (ouvrable) suivant !
La « visite du propriétaire »
Il était le plus âgé des pensionnaires, et il a séjourné durant 2 ans et 4 mois à Los Chiquitines. Sa personnalité engagée convenait très bien à une « visite du propriétaire »… parce ce que c’est vraiment de ça qu’il avait l’air !
Fait révélateur. À son arrivée, la psy a dit à Johan : « Je compte sur toi pour faire une visite guidée à tes parents, et montre-leur où est ta chambre », ce à quoi il a répondu : « Où ÉTAIT ma chambre ! ».
Sans mot inutiles (préférant laisser parler la psychologue) et marchant d’un pas sûr, il nous a montré sa chambre, sa classe, les douches et la cafétéria. Et bien sûr, il a voulu que son papa joue au foot avec ses amis !
5-4 pour une « équipe paquetée »…
J’aurais dû y penser : il formerait les équipes et il jouerait contre moi !
Et après avoir cherché à me déjouer dans le bas du but, à droite, depuis vendredi, c’est là que je l’attendais. Mais j’aurais dû y penser : il a marqué deux buts contre moi à Los Chiquitines… les deux à gauche !
Victoire de 5-4 pour Johan, Cesar, Kevin et leur bande : une équipe « paquetée » ! Je me suis fait avoir sur toute la ligne !
À Los Chiquitines, on nous a dit qu’il a suivi une formation particulière en soccer, à Cali; nous lui poserons des questions à ce sujet-là. Chose certaine, il a un talent naturel pour ce sport… ce qu’il sera relativement facile de développer dans une ville telle Joliette.
Des kilomètres et des kilomètres de route à prévoir cet été. L’an prochain. Et l’autre. Et l’autre…
La page est vraiment tournée…
Dans le blogue de vendredi, nous racontions que Johan nous a convaincus qu’il avait bel et bien tourné la page sur cette étape importante de sa vie en s’enfilant le premier dans le taxi pour quitter le centre d’adoption.
Aujourd’hui, il a fait le tour du personnel et de ses amis – dont Cesar, le seul à qui il a donné une carte postale du Canada. Une carte avec très peu de mots et une tape sur l’épaule. Tout était dit : un vrai gars !
Puis, il s’est à nouveau enfilé le premier dans le taxi de notre précieux guide Walter (le chauffeur de notre interprète Monica).
Quelques minutes plus tard, il s’est endormi sur l’épaule de Nathalie… preuve qu’il était BIEN et que cette visite l’avait épuisé !
Ce qui devait arriver arriva…
Depuis que nous avons décidé d’adopter « Théo » (nom de code, voir les blogues précédents) et que nous savons que nous irions le chercher dans un centre d’adoption, nous nous préparions à « l’étape » du départ. Soit l’instant précis où notre enfant – LE chanceux du jour – allait quitter, tout souriant. Alors que ceux et celles qui sont plus conscients de leur situation allaient rester sur la touche… Comme c’est arrivé un nombre incalculable de fois pour Johan…
Nous y pensions souvent, et… c’est arrivé en fin d’avant-midi aujourd’hui.
Vous comprendrez que nous préférons oublier ce qu’ils nous ont dit. Et oublier aussi les traits de leurs visages...
Tout ce que nous vous demandons, c’est de penser à eux. Surtout aux plus grands, pour qui le compte à rebours est exponentiel de jour en jour… Puisqu’ils se retrouveront à la rue, tôt ou tard, s’ils ne sont pas adoptés.
La morale de cette histoire…
Revenons à notre question du départ : est-il possible d’entrer dans un centre d’adoption sans être touchés ?
Et même plus : croyez-nous, c’est maintenant impossible d’y penser sans être touchés.
Chose certaine : vos appuis, de diverses manières, nous confirment que vous avez le cœur à la bonne place !
Muchas Gracias !
La réponse à cette question ne nous demande aucune réflexion… Incontestablement, une mission impossible.
RépondreSupprimerLa seule lecture de votre blogue nous suffit pour ressentir ces papillons, ces frissons et toutes ces émotions indescriptibles qui ont laissé des empreintes profondes dans notre mémoire. Une visite marquante. Franchir les grandes portes, se retourner pour saluer du regard et avancer vers l’avenir qui nous réserve tant de surprises, d’émerveillement, de rêves, de défis, d’inconnu… Chavirant!
Un adorable trésor de Cali brille maintenant au cœur de votre famille, une mignonne caleña rayonne auprès de nous et nos pensées s'unissent aux vôtres, souhaitant sincèrement que les étoiles s’alignent pour que tous ces beaux enfants de Chiquitines rencontrent enfin ceux qu’ils attendent depuis trop longtemps…
"Prendre un enfant par la main...prendre un enfant pour le sien..."...un geste qui prend racine dans le coeur de Dieu.
RépondreSupprimerLes larmes coulent librement chaque fois que je m'assois devant votre blogue. Ce sont tantôt des larmes de joie, tantôt des larmes de tristesse. Je suis tellement heureuse pour Johan et pour vous, Pierre, Nathalie, Charlotte et Étienne. Vous vivez un moment de grâces inoubliable qui n'a pas de prix. Mais le coeur me fait mal quand je pense à chaque enfant du monde qui attend désespérément que quelqu'un le prenne pour le sien. Ah! si j'avais trente ans!
Gracias Natacha ! Nous nous comprenons sans les mots qui ne peuvent traduire ce que nous avons vécu à Chiquitines... Et nous sommes à même d'apprécier le beau travail qui se fait là-bas ! Il y avait beaucoup de bébés. Et nous n'avons pas osé demander pourquoi tellement nous étions bouleversés. Nous avons appris que malheureusement le programme pour les mamans a dû être abandonné faute de fonds du gouvernement... Difficile :(
RépondreSupprimerLe personnel et les bénévoles entièrement dévoués sont remarquables. Vous auriez dû voir comment les enfants se sont délectés du gâteau et de la crème glacée que nous avions apportés... Ils sont heureux malgré tout. Au plaisir, Nathalie, Pierre et Johan